Par auteur > Briand Nolwenn

Depuis dix ans, un phénomène qu'on pensait ne pouvoir plus être appréhendé que par l'histoire sociale revient sur le devant de la scène confessionnelle française et internationale : l'appropriation catholique du cinéma. Depuis la sortie en salle Des hommes et des dieux (Xavier Beauvois, 2010), les festivals chrétiens de cinéma, les retraites spirituelles sur le cinéma et les ciné-clubs chrétiens se sont multipliés dans l'hexagone. Cette intervention s'appuie sur les résultats d'une enquête menée pendant près d'un an auprès d'organisateurs de festivals chrétiens de cinéma, du public de ces festivals et de représentants de l'association catholique mondiale pour la communication (SIGNIS). Cette ré-appropriation du cinéma par les acteurs chrétiens permet d'ouvrir des pistes de réflexion sur les moyens dont disposent les sciences sociales pour appréhender ce que signifie la réception cinématographique en contexte confessionnel chrétien. Mots-clés : Église Catholique, cinéma, réception, festivals, cinéphilies

Depuis dix ans, un phénomène qu'on pensait ne pouvoir plus être appréhendé que par l'histoire sociale revient sur le devant de la scène confessionnelle française et internationale : l'appropriation catholique du cinéma. Celle-ci prend désormais la forme de festivals chrétien de cinéma, de ciné-clubs chrétiens et de jurys d'Église. Ils s'accompagnent d'une littérature théorique « révélationniste » qui souligne les capacités du cinéma à dévoiler les interactions du sacré dans le monde terrestre. Cette réception confessionnelle des films, documentaires et de fiction, pose pour les sciences sociales un problème majeur : comment appréhender l'aspect sensible de la réception cinématographique en contexte confessionnel ? Quels sont nos outils, en tant que chercheur.e.s. pour comprendre ce qui, dans un film, donne naissance à une appréhension religieuse du film par un public religieux, dans un contexte de sociabilité confessionnelle. Cette intervention se pense en deux temps : tout d'abord, d'un point de vue méthodologique, il s'agit de préciser les moyens d'enquête possibles pour appréhender une expérience aussi sensible que celle de l'appréhension confessionnelle d'un film. Dans un second moment, il s'agit de présenter les premières conclusions d'une enquête multisite, menée pendant plus d'un an à l'aide des outils de recherche spécifiques, auprès d'organisateurs de festivals chrétiens de cinéma en France, de leurs publics ainsi que de représentants de l'antenne française de l'association catholique mondiale pour la communication (SIGNIS). Ces interlocuteurs insistent sur la précision sémantique de « festival chrétien de cinéma », par opposition à l'idée de « festival de cinéma chrétien ». Cette distinction, et les caractéristiques plus générales de leur réception, permettent de s'interroger sur la spécificité de l'expérience cinématographique en contexte religieux. L'ethnographie de la réception et l'observation attentive des critiques et des débats qui ont accompagné la projection des films permettent d'interroger la façon dont les sciences sociales peuvent rendre compte des interactions et des attentes cinématographiques des acteurs religieux dans nos sociétés occidentales. Parce que la réception cinématographique est parfois mise de côté dans les enquêtes en sociologie et anthropologie visuelle ou religieuse, il s'agit ici de proposer des pistes de recherche pour appréhender un élément fondamental de la création cinématographique : sa réception, par les acteurs sociaux qui y cherchent ou qui peuvent y trouver une dimension religieuse parfois aux antipodes des intentions créatrices des réalisateurs.